Une marque de luxe moderne

Lalique et la numismatique

Elle était la voix en or, la diva divine et admirée de son époque. Tous ceux qui aimaient le théâtre étaient à ses pieds : Sarah Bernhardt, la première célébrité internationale du monde du spectacle.

Collaboration avec des artistes innovants

Cela était peut-être aussi dû au talent d’actrice de Sarah Bernhardt. Mais surtout, elle savait comment faire parler d’elle. Tournées mondiales, événements et étroite collaboration avec les médias : Sarah Bernhardt s’est transformée en une star mondiale. Pour y parvenir, elle a travaillé avec de jeunes artistes talentueux qui ont mis en scène ses performances de manière moderne. Ses affiches ont été conçues par le graphiste tchèque Alfonse Mucha. À partir de 1891, ses décors de scène ont été créés par un joaillier relativement inconnu nommé René Lalique, qui avait ouvert un petit atelier en 1885.

Diadem from the René Lalique studio, made of gold, enamel and glass. Lalique Museum / Wingen-sur-Moder. Photo: KW.

Les bijoux de valeur ne doivent pas nécessairement être en or

Lalique offrait à Bernhardt un avantage décisif : il ne s’appuyait pas sur des matériaux précieux. Au contraire, il concevait ses pièces uniques à partir de matériaux peu coûteux qui étaient jusqu’alors rarement utilisés dans la joaillerie traditionnelle. Lalique utilisait de la corne, des pierres semi-précieuses, du verre, de l’ivoire et de l’émail, toujours en choisissant le matériau qui avait exactement la texture et la couleur adaptées à l’usage prévu. C’était idéal pour la scène. Les bijoux imposants et impressionnants étaient efficaces à distance sans coûter une fortune.

Ce fut la percée de Lalique. En 1890, il ouvrit sa propre boutique à Paris, dans un emplacement de choix. De là, Lalique conquit le monde avec ses bijoux et ses flacons de parfum.

Medaille von René Lalique mit dem Porträt von Sarah Bernhardt. iNumis Auktion Dezember 2018, Nr. 328. Verkauft mit 4.900 Euro.

La médaille de 1896

En 1896, l’année où Lalique créa cette médaille, il n’avait pas encore tout à fait percé. C’est peut-être pour cette raison qu’il accepta cette commande, qui dépassait en réalité quelque peu ses capacités. Lalique était connu pour ses créations. Il n’était certainement pas médailleur, comme le montre cette médaille.

Elle a été créée pour la Journée Sarah Bernhardt, le 9 décembre 1896. Il s’agissait d’une sorte de brunch au Grand Hôtel de Paris – aujourd’hui l’Intercontinental Paris Le Grand – avec un menu à plusieurs plats. Le menu (truite saumonée / escalope / pâté de foie d’oie / faisan / gâteau glacé) a été conservé dans les moindres détails, car c’est Alfonse Mucha qui l’avait créé. L’importance que Mucha accordait à l’événement est démontrée par le fait qu’il n’a pas demandé d’argent pour sa création, mais seulement trois billets pour l’événement. Après le repas, la fête s’est poursuivie au Théâtre de la Renaissance, où l’actrice a interprété une sorte de « best of » de ses succès sur scène. Il s’agissait notamment d’extraits de Phèdre de Racine et de Rome sauvée de Voltaire.

En souvenir pour les participants, René Lalique a créé une médaille qui ressemble davantage à un bijou qu’à un objet numismatique. Elle est percée d’un trou en haut afin de pouvoir être portée sur une chaîne. Elle a été coulée de telle manière que son avers rappelle davantage un tétradrachme stéphanéphore de la période hellénistique qu’une médaille contemporaine frappée. Au dos de la médaille, il y avait de la place pour une gravure personnalisée. Sur notre exemplaire, on peut lire : « à Sully pour l’heureux souvenir reconnaissant de la journée du 9 décembre 1896 Sarah Bernhardt ». Nous pouvons d’ailleurs identifier ce Sully. Jean Mounet-Sully était un collègue comédien et, pendant une courte période, l’amant de Sarah Bernhardt.

Cette rareté numismatique a été vendue 4 900 € lors d’une vente aux enchères en ligne organisée par iNumis le 5 décembre 2018. Ce prix est en réalité tout à fait raisonnable si l’on considère qu’il ne permettrait d’acheter qu’un des petits vases nouvellement créés par la marque de luxe Lalique.

Lalique : une marque de luxe moderne

Car Lalique existe encore aujourd’hui. À Wingen-sur-Moder, des artistes verriers produisent des objets innovants qui atteignent des prix élevés. Cependant, les bijoux sont rarement inclus. Même la seule médaille moderne de Lalique n’a pas encore fait son entrée dans le monde des enchères : en 1982, Lalique a créé les médailles olympiques pour Albertville.

Calouste Gulbenkian : collectionneur de pièces de monnaie et collectionneur de Lalique

Il existe d’ailleurs un autre lien entre Lalique et la numismatique. Le célèbre collectionneur de pièces de monnaie Calouste Gulbenkian, tout comme Sarah Bernhardt, appréciait la beauté des bijoux de Lalique. C’est pourquoi le musée Gulbenkian de Lisbonne abrite non seulement les plus belles pièces de monnaie grecques, mais aussi de magnifiques bijoux de René Lalique. L’une des plus grandes œuvres d’art, le pectoral libellule, a même été porté par Bernhardt – à titre de prêt.

 

Texte et images : Ursula Kampmann

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