La tour aux pièces de monnaie à Beeskow
Non, Beeskow, chef-lieu de l’arrondissement d’Oder-Spree dans le Land de Brandebourg, n’est pas envahie par les touristes. Pourtant, cette ville a beaucoup à offrir. Et je ne parle pas seulement du château avec son musée et de l’église Sainte-Marie, reconstruite après la réunification.
Beeskow possède en effet une enceinte fortifiée presque intacte. L’une des portes s’appelle la « Münzturm » (tour de la monnaie).
Une rapide recherche sur Internet m’a appris que les outils de frappe, le métal et les pièces finies de Beeskow étaient censés être conservés dans cette tour. Passionnant ! Je l’avoue : originaire du sud de l’Allemagne, je n’avais jamais entendu parler des pièces de Beeskow. Peut-être est-ce aussi votre cas.
Pièces des seigneurs de Strele
Les premières pièces auraient été frappées à Beeskow sous les seigneurs de Strele. Cette famille chevaleresque appartenait aux ministériaux de la dynastie des Wettin et saisit l’occasion qui se présenta lorsque les Wettin se retirèrent des régions situées au nord de la Spree : à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle, les seigneurs de Strele s’assurèrent une position

stratégiquement important et un point de passage commercialement vital sur l’Elbe. Ils construisirent un petit château, qui devint le centre de la ville marchande de Beeskow. La ville s’enrichit grâce au commerce à longue distance, à tel point qu’une des plus grandes églises du margraviat de Brandebourg y fut construite au XVe siècle.
Bien sûr, un marché avait besoin de pièces de monnaie, qui constituaient une excellente source de revenus pour son propriétaire. C’est pourquoi les seigneurs de Strele ont également frappé des pièces, dans quatre hôtels des monnaies à la fois. Outre Guben, Luckau et Spremberg, des pièces étaient désormais également frappées à Beeskow.
Ce qui nous ressemble à un B renversé ou à une ancre est, selon Emil Bahrfeldt, une représentation stylisée de lames de faux, qui font référence aux armoiries des seigneurs de Strele. Leur nom vient du vieux mot allemand « strele », qui signifie « faux ».
Bonne activité dans la région de Kipper et Wipper
Ces pièces médiévales sont extrêmement rares dans les ventes aux enchères. On trouve beaucoup plus fréquemment des pièces frappées par l’électeur Georges Guillaume de Brandebourg à Beeskow en 1621.
Elles ont été produites pendant la période des Kipper et Wipper, lorsque de nombreux maîtres monnayeurs se sont lancés dans le commerce lucratif de la monnaie bon marché.
Les Autrichiens avaient commencé à dévaluer leur monnaie afin de financer leur guerre en Bohême. Beaucoup d’autres leur emboîtèrent le pas et se débarrassèrent ainsi de leurs dettes aux dépens de leurs citoyens. Des souverains tels que l’électeur Georges Guillaume firent collecter des pièces de monnaie de poids normal, souvent par des entrepreneurs locaux, et les apportèrent à des hôtels des monnaies improvisés tels que la Münzturm (tour de la monnaie) à Beeskow. Là, les bonnes pièces étaient fondues et utilisées pour produire beaucoup plus de pennies à partir d’argent de qualité nettement inférieure.
Ces pièces arborent désormais deux blasons : à droite – héraldiquement à gauche – les trois faux des seigneurs de Beeskow ; à gauche, un bois de cerf à cinq pointes, c’est-à-dire la moitié d’un bois de cerf. Ces armoiries proviennent des seigneurs de Biberstein, qui ont pris le pouvoir à Beeskow après l’extinction de la lignée des seigneurs de Strele. En dessous se trouve un B pour Beeskow, au-dessus l’année 1621.
Il est intéressant de noter que cette pièce porte les armoiries de Beeskow et non celles du maître monnayeur…
La fin de la frappe des pièces
Mais ce fut la fin de la frappe de monnaie à Beeskow. Le matériel facilement transportable fut transféré vers d’autres hôtels des monnaies après la fin de la saison de frappe, et le reste fut entreposé dans la tour, qui servit également de prison municipale jusqu’en 1910.
S’il existe des preuves numismatiques plus récentes provenant de Beeskow, il s’agit de médailles privées, comme cette magnifique pièce qui raconte une course-poursuite en ballon organisée par le Beeskow Motorcycle Club en 1928.
Pour rappel, les motos étaient déjà assez rapides à l’époque. Avec une puissance d’environ 25 chevaux, elles pouvaient atteindre une vitesse de 120 kilomètres à l’heure. Mais cela ne servait pas à grand-chose lorsqu’il s’agissait de poursuivre un ballon volant à travers le pays dans toutes les directions. Il fallait une bonne connaissance des lieux et un bon sens de l’orientation. L’audace était plus importante qu’une machine rapide. Parfois, l’itinéraire pouvait traverser un pâturage ou une forêt apparemment infranchissable.
Et voilà. Notre excursion numismatique dans la petite ville de Beeskow touche à sa fin.

Beeskow. Monnaie officielle des seigneurs de Strele. Bractéate, vers 1250. Très beau. Vendu aux enchères Dr. Busso Peus Nachfolger 410-411 (2013), n° 2342 pour 140 euros.
Texte et images : Ursula Kampmann

Beeskow. Kipperpfennig 1621. Excellent état. Vendu aux enchères chez Heidelberger Münzhandlung Herbert Grün Auction 62 (2013), n° 1951 pour 30 euros. Photo : Lübke & Wiedemann.